Le 14 mars 2018, le rapport Vernier remis au gouvernement préconisait d’étendre le principe de la responsabilité élargie des producteurs (REP) en créant une filière dédiée aux déchets du bâtiment pour envisager une reprise gratuite des déchets. Depuis la présentation publique de cette proposition le 23 avril dernier par le premier ministre, les professionnels du BTP et de la construction ont fait savoir leur désaccord et entendent bien s’opposer à cette nouvelle mesure.
Pourquoi le secteur du BTP est-il aujourd’hui touché par des nouvelles mesures d’économie circulaire ? Quelles contestations émergent des professionnels de la construction ? Les déchets du bâtiment sont-ils un fardeau pour l’économie française ? On vous dit tout.
@Le Moniteur
Filière REP, ou comment gérer les déchets dans le secteur du bâtiment
Les dates clés :
- En octobre 2017, Nicolas Hulot et Bruno Le Maire confiaient à Jacques Vernier – président de la commission des filières de responsabilité élargie des producteurs – la mission de repenser le modèle des filières REP. Objectif : s’adapter aux nouveaux enjeux de recyclage et favoriser la transition de la France vers une économie circulaire.
- Le 14 mars dernier, Jacques Vernier proposait la création de 5 nouvelles filières REP, dont une dédiée aux déchets du BTP et de la construction.
Cette proposition, en accord avec les nouvelles mesures émises par le premier ministre Edouard Philippe, répond aux ambitions « écologiques, sociétales et économiques » du gouvernement.
Vers une France plus « verte »
Erwan Lemeur – président de Federec BTP – est formel : le secteur du bâtiment est responsable de plus des deux tiers des déchets en France avec plus de 250 millions de tonnes collectés en 2016*. Un record. Toujours en 2016, seulement 40 millions de tonnes ont été traitées et recyclées.
Le recyclage des déchets du BTP et de la construction est donc un secteur en plein essor. Cette activité se trouve au cœur des démarches d’économie circulaire, modèle vers lequel souhaite tendre la France.
Une mesure REP contestée par les acteurs économiques du bâtiment
Afin de rendre la collecte des déchets du bâtiment plus efficace et faciliter leur tri et leur recyclage, la création d’une filière REP est désormais posée. Aujourd’hui nombreux sont les industriels du secteur à faire part de leur mécontentement quant à une participation financière éventuelle. Ces derniers affirment qu’il y a un décalage avec le rapport émis par Jacques Vernier qui suggérait de « parvenir à la gratuité de la reprise de ces déchets ».
Les associations et organismes AIMCC, Capeb, FNBM et CME ont également fait savoir leur désaccord pour plusieurs raisons :
- Une éco-contribution sur les producteurs et distributeurs de matériaux. Elle permettrait de financer le diagnostic préalable à la déconstruction ou à la démolition. Une éco-contribution qui devra être répercutée sur les prix des produits de la construction.
- La reprise gratuite des matériaux. Un point contesté par la Fédération du négoce de bois et des matériaux de construction (FNBM). « Envisager la reprise gratuite des déchets relève d’une fiction économique, […] rien n’est gratuit ! » rappelle Franck Bernigaud, son président.
- L’impact sur le chiffre d’affaires des sociétés concernées. Cette nouvelle filière pourrait perturber les actions déjà réalisées et les initiatives en cours. Cette mesure se substituerait à des dispositifs déjà existants et approuvés, notamment l’application de l’article 93 de la Loi de transition énergétique et de son décret d’application du 10 mars 2016 sur l’organisation de la reprise des déchets.
- Une mise en place de la solution sans dialogue avec les acteurs concernés. Une méthode qui a étonné les parties prenantes de part le manque de communication.
*www.federec.com
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Les 17 filières de REP qui existent déjà, selon le principe de pollueur-payeur, (et les 5 nouvelles que propose le rapport Vernier) :
– Emballages
– Piles et accumulateurs portables
– Produits de l’agrofourniture
– Pneumatiques
– Equipements électriques et électroniques
– Automobiles
– Papiers graphiques
– Textile, linge de maison, chaussures
– Médicaments
– Mobil-homes
– Cartouches d’impression
– Gaz fluorés
– Déchets de soins à risques infectieux des ménages
– Ameublement
– Produits chimiques des ménages
– Bouteilles de gaz
– Bateaux de plaisance
– (Jouets)
– (Articles de sport et loisirs)
– (Déchets du bâtiment)
– (Huiles alimentaires)
– (Huiles moteurs)
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